Le
Synode Ordinaire
De telles
déclarations ont fait en sorte que la tension a continué de
s’accroître à mesure que le Synode Ordinaire de 2015 approchait.
Un incident, qui semblait représenter pour beaucoup la conduite
douteuse du processus synodal, fut l’histoire, qui a éclaté en
février 2015, de la "disparition" des exemplaires de
Demeurer dans la Vérité du Christ qui avaient été envoyés
par Ignace Press à tous les pères synodaux. Selon le récit
reconstitué par Edward Pentin, des exemplaires du livre ont été
expédiés à chaque père du synode, dans la salle du synode, dans
des enveloppes adressées individuellement, le premier jour du
synode, lundi 6 octobre. Les livres ont été livrés au bureau de
poste du Vatican le jeudi ou vendredi de la semaine. À leur arrivée,
ils ont été conduits dans les bureaux du secrétariat synodal.
C’est ici que l’une des enveloppes aurait été ouverte, le livre
identifié, et le Cardinal Baldisseri informé. Pour des raisons qui
ne sont pas claires, la procédure correcte n’a pas été suivie au
bureau de poste du Vatican et les enveloppes n’ont pas été
estampillées.
Pentin écrit :
Pentin écrit :
« Selon de
multiples sources, le cardinal était "furieux" d’apprendre
que le livre avait été envoyé aux pères synodaux... Une deuxième
source du secrétariat a dit qu’une "discussion" avait eu
lieu entre les membres du personnel sur ce qu’il fallait faire avec
les livres. Le Cardinal Baldisseri, a-t-il dit, "a explosé"
au sujet du livre en cours de livraison au synode. » (118)
La même source a informé Pentin que le Cardinal Baldisseri voulait bloquer la livraison des livres, mais le postier du Vatican lui a dit que ce serait illégal. Il a donc fait renvoyer les livres au bureau de poste afin qu’ils soient estampillés correctement et a ensuite retardé la livraison le plus longtemps possible. Ce n’est que le mercredi de la deuxième semaine, alors que le synode tirait à sa fin, et près d’une semaine après leur livraison initiale, que les livres furent finalement livrés aux boîtes aux lettres des pères synodaux. Ils ont été laissés à disposition pendant quelques jours pour satisfaire aux exigences légales, puis ont été retirés. La plupart des pères synodaux n’ont donc jamais reçu leur exemplaire de ce livre, qui défendait la doctrine éternelle de l’Église.
Aussi troublant que cet incident puisse paraître, il ne se compare pas au défi présenté à la doctrine catholique traditionnelle par la publication de l’Instrumentum Laboris, le document de travail du Synode Ordinaire, en juin 2015. Dans le présent document, la Relatio Synodi du Synode Extraordinaire est complétée par un commentaire approfondi qui développe les thèmes présentés dans le document initial et aborde certains sujets qui n’avaient pas été abordés auparavant. Le document contient les paragraphes 52, 53 et 55 de la Relatio Synodi, malgré leur rejet par le premier synode. Cependant, les problèmes liés à l’Instrumentum Laboris vont bien au-delà de cette question. Les critiques ont fait valoir que le document :
- a sapé l’enseignement de l’Église sur le mal intrinsèque du contrôle artificiel des naissances en proposant une fausse compréhension de la relation entre la conscience et la loi morale (paragraphe 137) ;
- introduit une ambiguïté dans l’enseignement de l’Église sur les méthodes artificielles de reproduction, telles que la FIV (fécondation in vitro), en discutant du « phénomène » sans porter de jugement sur la moralité de ces méthodes, ni faire référence à l’enseignement antérieur de Donum Vitae et Dignitatis Personae, ou à la perte de vie humaine qui résulte de leur utilisation (paragraphe 34) (119) ;
- réduit l’indissolubilité du mariage au niveau d’un « idéal » (paragraphe 42) ;
- suggère que la cohabitation et le « vivre ensemble » pourraient avoir des « aspects positifs » et pourraient, dans une certaine mesure, être considérés comme des formes légitimes d’union (paragraphes 57, 61, 63, 99 et 102) ;
- a préparé la voie à l’acceptation des unions homosexuelles en reconnaissant la nécessité de définir « le caractère spécifique de ces unions dans la société » (paragraphe 8) ;
- a nié les pleins droits des parents en ce qui concerne l’éducation sexuelle de leurs enfants (paragraphe 86).
La coalition pro-vie, Voice of the Family, a conclu que : « L’Instrumentum Laboris, à l’instar de la Relatio Post Disceptationem et de la Relatio Synodi du Synode Extraordinaire, menace toute la structure de l’enseignement catholique sur le mariage, la famille et la sexualité humaine. »
La composition du comité chargé de rédiger le rapport final du synode a confirmé ces craintes. Il était clair qu’au moins sept des dix rédacteurs nommés par le Pape François étaient des hommes d’opinions connues comme "progressistes". Outre le Cardinal Baldisseri et l’Archevêque Bruno Forte, il s’agit du Cardinal Wuerl de Washington, du Cardinal Dew de Wellington (120), de l’Archevêque Victor Manuel Fernandez d’Argentine (121), de Mgr Marcello Semeraro d’Albano et du Général des Jésuites, le Père Adolfo Nicolás.
Le Pape François a également fait un usage extensif de son pouvoir de faire des nominations spéciales au synode pour donner une voix et un vote aux prélats libéraux qui, autrement, n’auraient pas été présents. En dehors de Walter Kasper lui-même, son choix le plus célèbre fut peut-être le Cardinal Godfried Danneels, l’un des leaders du Groupe de Saint-Gall. Les antécédents de Danneels en matière de dissimulation d’un évêque qui abusait des enfants et de soutien à la légalisation de l’avortement et des unions homosexuelles ont déjà été décrits. Parmi les autres personnes controversées nommées par le Pape figuraient le Cardinal Dew, le Cardinal Cupich de Chicago, qui a ouvertement soutenu l’admission aux sacrements des adultères impénitents et des homosexuels pratiquants, et Walter Kasper lui-même.
Alors que l’ouverture du synode devenait imminente, le Cardinal Robert Sarah a exprimé les inquiétudes de nombreux hommes d’Église de premier plan :
« À
l’approche de la XIVe Assemblée Générale Ordinaire du Synode des
Évêques consacrée à « La Vocation et la Mission de la
Famille dans l’Église et le monde contemporain », les
Églises particulières, les facultés de théologie et les groupes
et associations de familles intensifient leurs préparatifs en vue de
cet événement ecclésial majeur. En même temps, on a le sentiment
que les faiseurs d’opinion, les groupes de pression et les lobbies
prennent de l’importance. Nous voyons aussi des stratégies de
communication se mettre en place ; il semblerait même que de
nouvelles méthodologies pour l’assemblée synodale soient
examinées afin de donner une voix à certaines lignes de pensée
tout en essayant d’en rendre d’autres inaudibles, sinon de les
faire taire complètement. Tout nous porte à croire que la prochaine
assemblée synodale sera pour beaucoup un synode aux enjeux élevés.
L’avenir de la famille est en jeu pour l’humanité aujourd’hui. »
(122)
Certes, deux jours avant l’ouverture du Synode, il a été annoncé que la Secrétariat du Synode avait « imaginé une nouvelle méthode » pour mener les discussions. Les pères synodaux passeraient beaucoup plus de temps dans de petits groupes linguistiques de discussion et relativement peu de temps en sessions plénières. Il n’y aurait pas de Relatio Post Disceptationem, ce qui signifie que, contrairement à l’année précédente où ce rapport intérimaire révélait l’ordre du jour au travail et provoquait une riposte, les pères synodaux ne recevraient aucune indication du contenu du rapport final jusqu’au tout dernier jour du Synode.
(118)
Pentin, "Rigging of a Vatican Synod ?" (Le montage d’un
Synode du Vatican ?), p.61.
(119)
"Donum Vitae", Congrégation pour la Doctrine de la Foi, 22
février 1987 ;
"Dignitatis
Personae", Congrégation pour la Doctrine de la Foi, 8 septembre
2008.
(120)
Il semblerait que Dew, l’une des récentes nominations de François
au collège des cardinaux, était l’évêque cité par le Père
Rosica comme ayant dit que l’Église devrait abandonner son langage
de condamnation du péché. Au cours du Synode d’octobre 2005,
l’Archevêque Dew a plaidé pour l’admission des divorcés et
remariés à la Sainte Communion.
(121)
Plus tard identifié comme l’auteur fantôme principal du Pape
François pour Amoris Laetitia.
(122)
Robert Cardinal Sarah, « What Sort of Pastoral Mercy in
Response to New Challenges on the Family ? A Reading of the
Lineamenta » (Quelle sorte de Pastorale de la Miséricorde pour
répondre aux nouveaux défis de la Famille ? Une lecture des
Lineamenta), dans "Christ’s New Homeland Africa : Contribution
to the Synod by African Pastors" (La Nouvelle Patrie du Christ
en Afrique : Contribution des Pasteurs Africains au Synode) (San
Francisco, 2015).
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