vendredi 6 avril 2018

The DICTATOR POPE (Marcantonio Colonna) -54-

Coups de poignard et massacre à la Curie
 
          Le journaliste anglais Damian Thompson cite un prêtre qui travaille à la Curie, et qui a commencé comme un fervent partisan du Pape François, en ces termes : « Bergoglio divise l’Église entre ceux qui sont avec lui et ceux qui sont contre lui – et s’il pense que vous êtes dans ce dernier camp, alors il vous pourchassera. » (162) Ce fut l’expérience de trois prêtres de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi. Au cours de l’été 2016, ils ont été convoqués en personne devant le Pape, accusés d’avoir fait des remarques défavorables à son égard et destitués (163). Le Cardinal Müller essaya de les défendre, et, dans une audience qu’il obtint après plusieurs mois d’essais, protesta auprès de François : « Ces personnes sont parmi les meilleures de mon dicastère... qu’ont-ils fait ? » Le Pape a repoussé ses protestations et a clôturé l’audience par les mots : « Et moi je suis le Pape, je n’ai pas besoin de donner les raisons de mes décisions. J’ai décidé qu’ils doivent partir et ils partiront. » (164)

      Le Cardinal Müller lui-même, en tant que chien de garde ex officio de l’orthodoxie catholique, a encouru la défaveur du Pape pour son opposition à la modification de l’enseignement de l’Église sur le mariage. Après un certain nombre d’échecs sur quatre ans, au cours desquels il a été effectivement remplacé par le Cardinal Schönborn comme autorité doctrinale officielle, le Cardinal Müller a été envoyé à la retraite en juillet 2017, à la fin de son mandat de cinq ans. Le non-renouvellement de son mandat contraste avec la pratique normale, tout comme sa retraite à l’âge de 69 ans (alors que le Cardinal Coccopalmiero, par exemple, continue de bénéficier du patronage du Pape à 79 ans) (165). Il convient également de noter que son remplaçant dans la Congrégation, l’Archevêque Ladaria, a été accusé de protéger un prêtre qui a agressé des garçons.

      Le traitement réservé au Cardinal Robert Sarah, Préfet de la Congrégation pour le Culte Divin, a été encore plus draconien, à certains égards. Le Pape François l’a nommé à ce poste en novembre 2014 et l’a chargé à l’époque de poursuivre la ligne liturgique tracée par le Pape Benoît XVI (166). Sa chute s’est produite lorsqu’il a exprimé son point de vue sur la manière moderne de dire la Messe. En juillet 2016, le Cardinal Sarah, s’adressant aux participants d’une conférence à Londres, a exhorté à la restauration de la pratique traditionnelle de la célébration ad orientem, c’est-à-dire avec le prêtre face à l’Orient liturgique. Contrairement à ce qui est généralement supposé, aucun ordre n’a jamais été donné pour que le prêtre dise la Messe face au peuple ; c’était une pratique introduite dans les années soixante, alors qu’on croyait que c’était l’usage de l’Église primitive, une idée qui est maintenant connue pour être erronée. Le Cardinal Ratzinger avait déjà fait cette remarque en 1993, alors qu’il était préfet de la Congrégation pour la Foi, et qu’il était familier avec ses écrits liturgiques en général. Instruire l’Église sur l’authenticité liturgique est censé être l’une des fonctions de la Congrégation pour le Culte Divin ; mais les paroles du Cardinal Sarah ont été reçues avec les protestations de ceux qui ont supposé que la pratique des cinquante dernières années est incontestable.

      Ce qui s’est passé ensuite, c’est d’abord une illustration du coup de poignard qui est devenu trop courant dans la Curie actuelle. Les lettres de protestation sont arrivées à Rome alors que le Cardinal Sarah était absent de Rome pour l’été. Sans lui donner l’occasion de les examiner, le Secrétaire de la Congrégation, Mgr Arthur Roche, remis les lettres au Pape François, qui n’est pas connu pour son savoir-faire en matière liturgique, et il a agi à partir de la connaissance d’un seul côté de la question, le côté ignorant. Sa réaction a été peut-être la plus proche d’une purge stalinienne que le Vatican a vue. En octobre, presque tous les membres de la Congrégation pour le Culte Divin, dont beaucoup avaient été nommés par Benoît XVI et avaient suivi sa ligne liturgique, ont été licenciés en masse, et 27 nouveaux membres ont été nommés pour prendre leur place, laissant ainsi le Cardinal Sarah complètement isolé (167). Il a été obligé d’annuler sa participation à une conférence liturgique à laquelle il devait prendre la parole sur « Le sens du Motu Proprio Summorum Pontificum pour le renouveau de la liturgie dans l’Église Latine ». Cette action contre le Cardinal Sarah s’inscrit dans le modèle du Pape François qui donne une série d’assurances à un fonctionnaire qu’il nomme, avant d’exécuter une volte-face ; et aussi de son attaque contre ceux qu’il considère comme des ennemis non pas en les rejetant, mais en les minant et en les laissant impuissants. Quant à l’Archevêque Roche, sa récompense pour son intervention a été qu’il est maintenant la personne qui règne en maître dans la Congrégation pour le Culte Divin.

      Le mot d’ordre du Groupe de Saint-Gall était la libéralisation de l’Église, et avec leur candidat au pouvoir, nous voyons maintenant ce que cela signifie. Une attitude d’horreur sacrée à l’égard de quiconque montre une dissidence de la ligne papale est l’orthodoxie régnante. Lorsque les quatre cardinaux Brandmüller, Burke, Caffarra et Meisner signèrent une lettre demandant des éclaircissements sur les ambiguïtés d’Amoris Laetitia, le doyen de la Rote Sacrée, l’Archevêque Vito Pinto, fit la déclaration : « Ce que ces cardinaux ont fait, c’est un scandale très grave qui pourrait conduire le Saint-Père à les priver du chapeau de cardinal... On ne peut pas douter de l’action de l’Esprit Saint. » (168) Pour sa part, le Cardinal Blase Cupich de Chicago (qui a reçu le chapeau rouge en octobre 2016 de préférence à plusieurs autres prélats américains dont beaucoup pensaient que les choix étaient plus évidents) a déclaré que les cardinaux avaient « besoin d’une conversion ». Dans un autre domaine, l’Archevêque Rino Fisichella, Président du Conseil pour la Nouvelle Évangélisation, a ouvert l’Année de la Miséricorde en suggérant que ceux qui critiquent le Pape encourent l’excommunication prescrite par le droit canonique pour ceux qui font des violences physiques au Pontife, au motif que « les mots aussi sont des cailloux et des pierres » (169). C’est ainsi qu’on s’entend dans l’Église du Pape François, et la leçon est en train d’être bien apprise.

(162) Article dans The Spectator du 14 janvier 2017 : « Pourquoi de plus en plus de prêtres ne supportent pas le Pape François. »

(163) Il faut rappeler qu’avant de décider d’entrer dans l’état clérical, Jorge Bergoglio travaillait comme videur de boîte de nuit dans une banlieue de Buenos Aires. L’expérience semble avoir été formatrice.

(164) LifeSiteNews, 12 janvier 2017, article de Lisa Bourne : « Le Pape se moque encore une fois des défenseurs de l’enseignement de l’Église comme n’étant pas comme le Christ. » Il s’agit du rapport le plus authentique d’une anecdote qui circule depuis quelques semaines dans les cercles du Vatican.

(165) Le licenciement du Cardinal Müller et de ses subordonnés n’a pas respecté les normes de traitement des employés qui devraient être observées dans toute entreprise ordinaire, et encore moins dans une Église qui prêche le respect des droits des travailleurs. Le sujet est traité par Damian Thompson dans The Spectator du 12 juillet 2017 : « Le Pape François se comporte comme un dictateur latino-américain – mais les médias libéraux ne s’y intéressent pas. »

(166) Sarah a été transférée à la Congrégation pour le Culte Divin, du Conseil Pontifical Cor Unum où il avait été chargé par le Pape Benoît XVI de "re-catholiciser" l’organisation puissante et riche Caritas Internationalis qui avait promu des causes politiques de gauche. Comme président de Caritas Internationalis, le Pape François a installé le Cardinal Tagle (que beaucoup considèrent comme son successeur naturel en tant que candidat papabile libéral), mettant ainsi un terme à la tentative de réforme de Benoît XVI.

(167) OnePeterFive, 31 octobre 2016 : article de Maike Hickson, « Remue-ménage à la Congrégation pour le Culte Divin décrit comme une "Purge" »

(168) Cité dans Il Foglio du 29 novembre 2016.

(169) Article dans LifeSiteNews, 7 décembre 2015 : « Les critiques du Pape menacés d’excommunication au début de l’Année de la Miséricorde. »

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